
Soigner sans aggraver le mal
Le système de santé a pour mission de réparer les corps. Mais il doit désormais apprendre à ne plus abîmer le climat. Pourtant, en matière de soins, l’impact environnemental est encore rarement pris en compte. Ce n’est pas qu’il soit contesté. Il est simplement relégué. Invisible. Hors cadre.
Pourtant, les données s’accumulent. Le rapport Operation Zero, récemment publié par le Plan national environnement-santé (NEHAP 3), estime que les soins de santé représentent près de 5 % des émissions nationales de gaz à effet de serre. À ce rythme, sans changement structurel, ces émissions pourraient bondir de 61 % d’ici 2050. Même les meilleures intentions n’y suffiront pas : un « gap » de 45 % subsistera, même en appliquant toutes les mesures actuellement identifiées.
Ce constat met en lumière une faille structurelle : l’écologie ne peut plus rester cantonnée aux discours ou aux initiatives périphériques. Elle doit devenir un axe stratégique de la politique de santé. Il s’agit de faire évoluer nos politiques de santé dans leur cœur même : évaluation des actes, critères de remboursement, choix technologiques, modes d’organisation… Partout, l’empreinte carbone devrait devenir un critère à part entière, au même titre que l’efficacité, la sécurité ou la pertinence clinique.
Le travail des Shifters Belgium (lire ci-contre) montre que cette intégration est non seulement possible, mais souhaitable. D’autres suivront. Encore faut-il qu’ils soient entendus.
La décarbonation du soin passe par mille gestes, mille arbitrages. Ce ne sera pas toujours simple. Mais intégrer le climat dans les décisions de santé n’est plus un luxe, c’est une urgence éthique. Soigner durablement, c’est possible. À condition de le décider.