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JM Academy / Diversité des genres (II)

La chirurgie virilisante

La chirurgie virilisante de confirmation de genre débute généralement par une mastectomie. Il existe différentes techniques de chirurgie génitale de confirmation du genre, qui pourront être appliquées en fonction des besoins de la personne.

Pr Marlon Buncamper
Le Pr Marlon Buncamper, chirurgien plasticien au sein de l’équipe chargée des questions liées au genre à l’UZ Gent. © JDB

Comme les hommes transgenres ont souvent du mal à accepter psychologiquement leur poitrine (= dysphorie de genre) et/ou qu'il est difficile de s’afficher en public comme un homme avec une poitrine de femme, la mastectomie sous-cutanée est parfois pratiquée très tôt dans le parcours de soins : l'intervention peut être réalisée avant même le début du traitement hormonal, pour autant que le parcours avec le psychologue ait été concluant. « Un bon nombre d'hommes trans estiment que la mastectomie est suffisante et ne souhaitent pas d'autre intervention chirurgicale à visée virilisante », explique le Pr Marlon Buncamper, chirurgien plasticien au sein de l’équipe chargée des questions liées au genre à l’UZ Gent.

« Ils peuvent avoir différentes raisons de ne pas souhaiter une chirurgie génitale. Parfois, c'est simplement parce qu'après une mastectomie, ils peuvent continuer à vivre avec leur corps tel qu'il est. D'autres hommes trouvent la chirurgie génitale trop risquée, malgré l’importante expérience acquise par les chirurgiens. » La mastectomie sous-cutanée est une intervention fréquemment pratiquée chez les hommes trans à l’UZ Gent. « Nous en réalisons quatre à cinq par semaine », précise Marlon Buncamper.

La chirurgie faciale de confirmation du genre n'est généralement pas nécessaire chez les hommes transgenres car la prise de testostérone induit une virilisation suffisante du visage. Une  liposuccion est parfois effectuée pour affiner les hanches.

L’aide à la décision

La chirurgie génitale de confirmation de genre est expliquée au cours d'une séance d'information à l'issue de laquelle le psychologue examine la compatibilité des différentes options avec les souhaits de la personne.

Sur le plan technique, l'hystérectomie couplée à l'ovariectomie n'est pas compliquée, mais il est important d’informer sur les procédures ultérieures lorsqu’une colpectomie est nécessaire. Tout désir d'enfant doit également être discuté au préalable, avec la possibilité de cryoconservation des ovocytes. Toutefois, certains hommes transgenres souhaitent porter eux-mêmes un enfant, ce qui entraîne la préservation de l'utérus et les ovaires au moins jusqu'à ce que le désir d'enfant soit concrétisé ou qu’il y soit renoncé.

En ce qui concerne la chirurgie génitale sensu stricto, une aide à la décision informatisée peut être présentée à la personne demandeuse. Issue d’une collaboration entre médecins et demandeurs de soins, cette aide comprend des questions telles que : la possibilité de pénétrer votre partenaire est-elle importante pour vous ? Attachez-vous de l’importance aux cicatrices ? Les cicatrices peuvent en effet être perçues comme gênantes par les personnes qui souhaitent fréquenter un sauna. Un autre critère essentiel pour déterminer la stratégie à suivre est l'importance éventuelle de la miction en position debout. En fonction des réponses données, l'algorithme suggèrera l'option la plus appropriée pour la transition génitale. « Lorsque la personne revient à la polyclinique, nous parcourons à nouveau les réponses et les souhaits et nous prenons une décision partagée », rapporte le spécialiste.

La métaidoïoplastie

Certaines personnes souhaitent surtout l'ablation du vagin. L’intervention peut alors se limiter à une métaidoïoplastie (construction d'un micropénis). Cette technique consiste à allonger le clitoris en utilisant la peau des petites lèvres. Un scrotum sera créé à partir des grandes lèvres.

La métaidoïoplastie peut être réalisée avec ou sans allongement de l'urètre. Dans la variante sans allongement, l'urètre débouche directement dans le périnée, en arrière du scrotum - son embouchure reste dans sa position d'origine. Si la personne souhaite pouvoir uriner en position debout, l'urètre sera prolongé par du tissu provenant des petites lèvres et sera fixé à la base du micropénis. Un avantage important de la métaidoïoplastie est la préservation de la sensibilité naturelle du gland. Le micropénis est érectile mais sa petite taille le rend inadapté  à la pénétration. « Le micropénis a les dimensions du pénis d’un garçon prépubère », précise Marlon Buncamper. « Comme elle nécessite moins de tissus, la métaidoïoplastie sans allongement de l'urètre permet de créer un micropénis légèrement plus long. » La métaidoïoplastie ne crée guère de cicatrices.

La phalloplastie

Une phalloplastie peut être envisagée lorsque la personne souhaite avoir la possibilité de relations sexuelles avec pénétration. Ici aussi, deux variantes seront discutées : avec ou sans allongement de l'urètre.

La phalloplastie avec allongement urétral est réalisée à l'aide d'un lambeau cutané prélevé au niveau de l'avant-bras, avec ses nerfs et vaisseaux sanguins (lambeau radial anté-brachial, radial forearm flap ou RFF). « Nous créons ainsi un tube à l’intérieur d’un autre tube », explique Marlon Buncamper. « Le lambeau est enroulé deux fois sur lui-même, créant ainsi un urètre à l'intérieur et une sorte de tronc à l'extérieur. » Une épilation préalable de la peau formant l'urètre est nécessaire.

Des connexions nerveuses sont établies par microchirurgie pour obtenir une sensibilité tactile et améliorer la sensibilité érogène. Le clitoris est complètement dénudé. Son nerf dorsal est libéré d'un côté, puis connecté au nerf cutané du lambeau radial pour la sensibilité érogène. En outre, le lambeau est connecté au nerf inguinal pour assurer une sensibilité tactile et protectrice. Les vaisseaux sanguins du lambeau sont anastomosés par microchirurgie à l'artère fémorale et à la grande saphène. La phalloplastie est choisie par les personnes qui estiment que l’existence d’une cicatrice sur l'avant-bras est moins gênante.

Des connexions nerveuses sont établies par microchirurgie pour obtenir une sensibilité tactile et améliorer la sensibilité érogène.

Le prélèvement d’un lambeau au niveau de la cuisse (anterolateral tigh flap, ALT) peut suffire lorsqu’un allongement de l’urètre n’est pas souhaité. Dans cette procédure, la peau est également prélevée avec ses vaisseaux sanguins et ses nerfs, puis tunellisée jusqu'au-dessus du pubis, avec création d’une gaine pénienne. Cela n’est possible que si la cuisse n’est pas trop adipeuse car le lambeau serait trop volumineux – et le néophallus le serait également. Dans certains cas, un lambeau de peau est prélevé sur le flanc. « Des combinaisons sont possibles », indique Marlon Buncamper. « Si la personne souhaite éviter des cicatrices importantes sur l'avant-bras mais demande bien qu’un urètre soit installé dans le phallus, nous ne créons le plus souvent que l'urètre avec de la peau du bras, tandis que le « tronc » phallique est réalisé avec un lambeau prélevé au niveau de la cuisse ou du flanc – à condition que la personne soit suffisamment mince. Mais d'autres combinaisons de lambeaux sont également possibles. »

« Les patients renoncent parfois à l'allongement de l'urètre parce qu’il est responsable des principaux problèmes rencontrés après une phalloplastie (fistules ou sténoses). D’après la littérature, ce type de complications survient dans 10 à 50 % des cas, et la correction nécessite plusieurs interventions chirurgicales. Quoi qu’il en soit, la phalloplastie est une intervention chirurgicale complexe. Les urologues sont les premiers à intervenir, pour créer l'urètre et le scrotum. Ensuite, les chirurgiens plasticiens se mettent au travail pour créer un phallus. »

Après la phalloplastie (ainsi que la métaidoïoplastie), le scrotum peut être rempli par deux prothèses testiculaires. Lors de la mise en place d'une prothèse érectile (lire ci-dessous), le mécanisme de pompage est parfois placé dans un des côtés du scrotum, en lieu et place d’une prothèse testiculaire.

La fonction sexuelle

Après la phalloplastie, un orgasme peut être obtenu en frottant la peau du clitoris qui a été incluse dans le néophallus et dont un nerf a été préservé. « Cependant, comme du tissu a été placé par-dessus le clitoris, la sensation n'est pas la même qu'auparavant. C'est un peu comme si l'on frottait le clitoris avec un coton-tige », explique Marlon Buncamper. « L’absence de contractions de l'utérus et des muscles vaginaux peut également expliquer pourquoi la sensation n'est pas la même que celle d’un orgasme féminin. »

Il existe plusieurs techniques permettant d’obtenir des érections dans l’affirmation de genre masculin, la plus commune étant l’implantation d’une prothèse érectile. « Ce type de prothèse peut poser problème au fil du temps. Il faut se rappeler qu’au départ, les prothèses d'érection ont été développées pour les hommes âgés qui souffrent de troubles érectiles et qui ont dans l’ensemble tendance à être moins actifs sur le plan sexuel que la population dont nous nous occupons. De plus, ces prothèses doivent être logées dans les corps caverneux, qui sont absents dans le cas d'une phalloplastie. Par conséquent, non seulement leur implantation est difficile, mais elles ne restent pas toujours en place. Ces différentes raisons expliquent pourquoi elles peuvent provoquer des douleurs, voire se casser en cas d'utilisation fréquente. Enfin, comme il s’agit de corps étrangers, elles sont sujettes aux infections. Autant de raisons, donc, qui n’incitent pas à poser une prothèse érectile chez un homme transgenre. »

« Une pratique occasionnellement observée chez les hommes trans consiste à superposer deux préservatifs sur le phallus, ce qui peut le faire gonfler légèrement. Il existe dans le commerce des dispositifs visant à faciliter la pénétration, comme les manchons par exemple, qui sont des formes en caoutchouc pouvant être enfilées sur le pénis. »

Objectifs d’apprentissage

La lecture de cet article vous aura familiarisé(e) avec :

·       Le bon timing de la mastectomie sous-cutanée ;

·       Le souhait exprimé par certains hommes de limiter la chirurgie de confirmation de genre à la mastectomie ;

·       L'utilisation d'une aide à la décision informatisée pour déterminer le type de chirurgie génitale le plus approprié pour la personne dans son parcours de  confirmation de genre ;

·       Les indications et les aspects techniques de la métaidoïoplastie ;

·       Le fonctionnement sexuel après métaidoïoplastie ;

·       Les indications et les aspects techniques de la phalloplastie ;

·       La fonction sexuelle après phalloplastie.

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Écrit par Dre Michèle Langendries30 avril 2025

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