L’interview d’Arthur Poncelet, nouveau président du Modes/Cartel en pages 6-7
Yves Smeets (Santhea)
« La réforme hospitalière manque de temps et de moyens »
La réforme du financement hospitalier doit entrer en vigueur au 1er janvier 2028. Pour Yves Smeets, directeur général de la fédération hospitalière Santhea, le calendrier est irréaliste. « On est fin 2025 maintenant, on a presque deux ans pour tout mettre en place. Quand on voit le trajet qu’il a fallu pour arriver au stade actuel de la réforme des honoraires, ça nous paraît illusoire d’y arriver à temps. »
L’ambition du ministre est de passer d’un financement éclaté – budget des moyens financiers, honoraires, fonds « blouses blanches », maribel social – à un modèle unique par pathologies (DRG pour diagnosis related group). Mais les conditions ne sont pas réunies. « Il n’existe aujourd’hui aucune équipe qui travaille concrètement sur la transition vers ce système. Et l’institut des DRG qu’on réclamait n’a jamais vu le jour », souligne Yves Smeets. Qui craint pour la pérennité des hôpitaux si rien n’est fait. « Si les hôpitaux ne peuvent pas facturer et être remboursés correctement, ils ferment la porte et mettent leur personnel au chômage. »
Un contexte difficile
À cette incertitude s’ajoute la fragilité financière des hôpitaux. Les institutions restent dans le rouge malgré les efforts imposés ces dernières années. « Nous ne voyons pas d’amélioration, au contraire », constate Yves Smeets. Les nouvelles charges se multiplient sans couverture adéquate. L’homme fort de Santhea cite l’exemple de la cybersécurité. « La directive NIS2 (entrée en vigueur il y a tout juste un an, NdlR) impose de nouvelles obligations en matière de sécurité, mais avec des financements tellement anecdotiques qu’on ne peut pas suivre. » Même logique du côté des économies : 50 millions sont demandés sur l’hospitalisation de jour, « ce qui touchera directement nos budgets ».
Pour Santhea, la réforme est nécessaire, mais elle doit être crédible. « Nous sommes favorables à un financement plus simple, plus lisible et plus transparent. Mais il faut du temps, de la concertation et surtout de l’argent. » Faute de quoi, les conséquences pourraient être lourdes : « Les hôpitaux, ce sont des porte-avions. On ne change pas leur direction en deux ans. Si on ne se donne pas les moyens de réussir cette réforme, on risque un chaos budgétaire et organisationnel. »
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Un budget 2026 sous haute tension
Les différentes parties réunies ces dernières semaines à la table des négociations sur le budget des soins de santé pour 2026 ont entamé la dernière ligne droite. Le Comité de l’assurance de l’Inami qui s’est tenu ce lundi doit faire une proposition de budget en vue du Conseil général qui se tiendra le 20 octobre.
Pour Le journal du Médecin, Jean-Pascal Labille, secrétaire général de Solidaris, analyse ce budget qui, comme chaque automne désormais, s’annonce complexe, avec une norme de croissance réduite à sa plus simple expression (2 %, soit +1,546 milliard).
Le gouvernement a d’ores et déjà annoncé sa volonté de faire d’importantes économies (907 millions, dont 150 millions à charge des médecins et 50 millions pour les hôpitaux) et a procédé par l’envoi d’une lettre de mission – fait rare dans la concertation sociale.
Les besoins demeurent criants, notamment au niveau des soignants, « médecins y compris », mais « il n'y a aucune marge pour des initiatives nouvelles », regrette Jean-Pascal Labille, qui souligne à quel point il est compliqué de se mettre d’accord, « surtout quand il n’y a pas de moyens. »
Interview en pages 8 et 9