Plan retour au travail
Malades de longue durée : « Qui va engager ces 100.000 personnes ? »
Elise Derroitte, vice-présidente de la Mutualité chrétienne (MC) réagit vivement aux orientations budgétaires et aux mesures envisagées pour les malades de longue durée. Elle appelle à sortir d’un discours centré sur la culpabilisation individuelle et à replacer l’incapacité de travail dans une responsabilité collective assumée par la société dans son ensemble.
Une note positive pour commencer : la MC juge pertinente l’instauration d’une consultation annuelle avec le médecin traitant pour aborder à la fois la situation médicale et le potentiel de retour au travail.
Elle plaide évidemment pour une collaboration accrue entre médecin traitant, médecin du travail et médecin-conseil. La plateforme TRIO pourrait jouer un rôle clé, à condition que les médecins de première ligne puissent y partager davantage d’informations utiles à l’accompagnement des patients.
Ambiguïté de la note Vandenbroucke
Selon la MC, la première note du ministre Frank Vandenbroucke sur les malades de longue durée reste ambiguë. « S’agit-il d’une note d’économies ou d’une note de vision ? Cela dépend clairement du parti qui la lit », observe Elise Derroitte.
La mutualité s’interroge surtout sur l’objectif de réintégration de 100.000 personnes afin de générer 1,9 milliard d’euros d’économies. « Qui embauchera ces personnes ? », demande-t-elle, qu’il s’agisse des plus de 55 ans, des personnes handicapées, des nouveaux arrivants avec des problèmes de santé, des réfugiés ou encore des femmes sans diplôme atteintes d’une maladie chronique. « Je doute que les employeurs attendent réellement l’arrivée de ces 100.000 personnes vulnérables sur le marché du travail », prévient-elle.
La MC alerte dès lors sur un risque de précarisation: si ces personnes ne trouvent ni emploi ni prise en charge financière adaptée, elles pourraient basculer dans la pauvreté. Pour la mutualité, une économie budgétaire aussi vaste ne peut se faire au détriment des publics les plus fragiles.
Un marché du travail imparfait
La MC rappelle que les offres d’emploi ne correspondent pas forcément au profil des personnes éloignées du marché du travail. Elle souligne aussi l’augmentation annuelle d’environ 20.000 travailleurs qui basculent dans l’incapacité de travail. « Comment allons-nous prévenir cette évolution ? Les efforts restent insuffisants », estime la vice-présidente.
L’augmentation des moyens pour les contrôleurs est jugée positive, mais ne constitue pas une réponse structurelle aux difficultés des malades de longue durée. Le problème touche aux conditions de travail, à l’allongement des carrières, à la hausse des troubles psychiques et au manque d’emplois adaptés.
Un risque de stigmatisation
La MC se dit favorable au renforcement de la lutte contre la fraude, tout en mettant en garde contre un glissement vers la suspicion généralisée. « La grande majorité des personnes sont réellement malades », rappelle-t-elle.
La MC salue le renforcement de la première ligne psychologique, notamment pour les problèmes liés au travail.
La mutualité critique aussi l’absence d’indexation des allocations au-delà de 2.000 euros brut (et 4.000 euros pour les salariés). Elle y voit « une politique d’appauvrissement » qui fragilise davantage les personnes en incapacité.
La MC salue le renforcement de la première ligne psychologique, notamment pour les problèmes liés au travail. Elle insiste sur l’importance pour les médecins-conseils de disposer du temps nécessaire pour évaluer chaque cas, en collaboration avec une équipe paramédicale.
La mutualité souligne également la nécessité de mieux impliquer les employeurs dans la prévention et la réintégration. Elle regrette que les moyens issus de la responsabilisation soient redistribués aux entreprises sans conditionner ces fonds à des engagements concrets. Les discriminations envers les travailleurs ayant des antécédents médicaux restent trop fréquentes.